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Trente ans après la signature de la Convention sur la diversité biologique des Nations unies, le portrait est plus sombre que jamais, mais plusieurs tentent toujours de lutter contre le déclin de la biodiversité. Le Devoir a discuté du sujet avec la secrétaire exécutive de la Convention, Elizabeth Maruma Mrema, et le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault.
On ne souffre pas seulement de la crise climatique, mais aussi de la perte de biodiversité », résume au Devoir la secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique, Elizabeth Maruma Mrema, alors que ce traité onusien issu du Sommet de la Terre de Rio, en 1992, fête ces jours-ci son 30e anniversaire.
Le constat de cette avocate tanzanienne est d’ailleurs sans équivoque : malgré trois décennies de promesses des pays signataires — ils sont aujourd’hui 196 —, la crise de la biodiversité est pire que jamais. « Les plus récentes données scientifiques ne nous offrent pas un portrait positif. La situation est mauvaise. La biodiversité décline à un rythme sans précédent, en raison de l’augmentation des pressions qui provoquent ce déclin », insiste celle qui sera à la tribune du Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM) ce mardi.
Des espèces de mammifères qui disparaissent de plus en plus rapidement, victimes du braconnage et de la destruction de leurs habitats naturels, des populations d’oiseaux, d’amphibiens, d’insectes ou de poissons en chute libre et des écosystèmes jadis riches qui sont rayés de la carte au nom de l’étalement des activités humaines… Les voyants sont plus que jamais au rouge, à l’image de la « liste rouge » de l’Union internationale pour la conservation de la nature, qui recense les espèces menacées et qui s’allonge année après année.
Elizabeth Maruma Mrema cite en exemple le portrait dressé par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) : pas moins d’un million d’espèces animales et végétales, sur les quelque huit millions estimées sur Terre, sont menacées d’extinction, dont « beaucoup dans les prochaines décennies ».
Biodiversité et climat
L’activité humaine est directement en cause dans les déclins observés un peu partout dans le monde. Déforestation, agriculture intensive, surpêche, urbanisation galopante, braconnage, exploitation des ressources naturelles non renouvelables : 75 % de l’environnement terrestre a été « gravement altéré » par les activités humaines et 66 % de l’environnement marin est également touché, selon l’IPBES.
La situation est telle que le ministre canadien de l’Environnement, Steven Guilbeault, estime que les constats sur la sévérité de la crise climatique sont valables pour décrire la crise de la biodiversité. En entrevue au Devoir, il souligne aussi la nécessité de s’attaquer aux deux crises en même temps, notamment parce que la protection des écosystèmes naturels, comme les forêts, est considérée comme « une solution basée sur la nature » pour lutter contre le réchauffement du climat.
« Pendant trop longtemps, on s’est attaqués à ces questions en silo. Mais je pense qu’un des grands mérites de la présidence britannique à la Conférence climatique de l’ONU de Glasgow, en 2021, est d’avoir brisé ces silos et de faire en sorte que maintenant, quand on travaille sur la protection de la biodiversité, on travaille aussi sur la lutte contre les changements climatiques et la lutte contre la désertification », fait-il valoir.
Les deux crises sont d’autant plus liées que le déclin de la biodiversité, qui sape les fondements même de la vie sur Terre, devrait s’aggraver en raison des impacts des dérèglements climatiques. À titre d’exemple, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat évalue que plus de 90 % des récifs de corail de la planète risquent de disparaître si le réchauffement planétaire atteint les 1,5 °C, ce qui pourrait survenir bien avant 2040. Or, ces récifs regroupent plus de 30 % des espèces marines de la planète.
« Haute ambition »
Le gouvernement Trudeau, qui fait partie de la « Coalition de la haute ambition » pour la nature, avec près d’une centaine d’autres pays, espère en outre que la Conférence des Nations unies sur la biodiversité prévue plus tard cette année sera l’occasion de rehausser les objectifs internationaux. Le ministre Guilbeault dit souhaiter que plusieurs États s’engagent, à l’instar du Canada, à protéger 30 % de leurs milieux naturels terrestres et marins d’ici 2030. « J’ai bon espoir d’une entente robuste », dit-il.
En ce qui a trait à la protection des milieux marins, la tâche s’annonce difficile, reconnaît Steven Guilbeault, puisqu’à peine 7 % de ces écosystèmes sont aujourd’hui protégés à l’échelle de la planète. « On part de loin, il y a beaucoup de travail à faire. Mais quand on voit à quel rythme les projets voient le jour, par exemple au Canada, on voit que c’est possible. »
Elizabeth Maruma Mrema espère elle aussi que les négociations des prochains mois permettront de mieux protéger les écosystèmes, mais aussi d’envisager la restauration de milieux naturels dégradés par des décennies d’activités humaines « non durables ».
Même si elle ne peut se prononcer sur le cas de pays en particulier, elle estime essentiel de freiner la dégradation qui frappe plusieurs régions de la planète, dont des zones de très grande biodiversité. « Pour toutes les forêts dans le monde, nous avons besoin de nous engager dans une stratégie qui combine des aires protégées avec des politiques plus efficaces pour combattre les activités de déforestation », souligne-t-elle.
Dans les faits, cette volonté se heurte parfois aux politiques de certains gouvernements. Depuis l’arrivée au pouvoir du président Jair Bolsonaro au Brésil, par exemple, la destruction de l’irremplaçable forêt amazonienne s’est accélérée. Uniquement en avril, selon les données officielles, pas moins de 1000 km2 ont été rasés. Et au cours de la période 2020-2021, l’Amazonie brésilienne (60 % de la plus vaste forêt tropicale de la planète) a perdu 13 235 km2.
« Il existe aussi des pays exemplaires, comme le Gabon ou le Costa Rica, où la très grande majorité de la forêt est protégée. Il y a donc des pays qui ont réussi à faire des modèles durables pour les communautés, les emplois et pour l’environnement », salue le ministre Steven Guilbeault.
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